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L'avis des autres

Photo du rédacteur: CaroleCarole

Ma grand-mère disait "il y a autant d'avis que de chemises." Comme dans bien des choses, ma grand-mère avait raison.

En tant qu'artiste, la création est soumise à des choix, conscients ou non, volontaires, furtifs, éclairés, visionnaires, qui définissent par la suite le ton, la douceur, la tessiture d'une oeuvre et que l'on n'est pas toujours en mesure d'expliquer.


L'avis des autres opère pour moi de la même manière. En règle générale, je n'aime pas parler de ce que j'écris. Je suis assez discrète sur le sujet et la plupart des gens de mon entourage n'en entendront pas parler avant que le projet soit fini et abouti et que j'estime qu'il soit prêt à avoir une vie qui lui soit propre. En règle générale, seules ma mère et ma sœur sont au courant que j'écris "quelque chose" et les détails restent sporadiques. Je pitch très bien dans ma vie de start-uppeuse mais j'ai beaucoup plus de mal à condenser une histoire que j'ai écrite pour en faire un résumé accrocheur. Pour "Une Ombre Chacun" ce n'est d'ailleurs pas moi qui vais écrire la 4ème de couverture ni le pitch long qui sera sur le communiqué de presse. Je pense que la distance et la perspective de quelqu'un d'extérieur à moi-même ne peut qu'amener plus de clarté.

Pourquoi ce goût du secret? Une certaine pudeur, couplée avec la peur du sentiment définitif. Si je commence à demander l'avis des autres sur mon travail, c'est que j'estime qu'il est suffisamment abouti pour avoir un retour. Or j'estime rarement que mon travail est abouti, je pourrais m'éditer jusqu'à plus soif, je pourrais modifier dix fois la même phrase, enlever une virgule, rajouter un point, changer un adjectif, le remettre... Faire le choix final d'un mot, comme accepter la fin d'un manuscrit, est un choix lourd, définitif et difficile devant lequel je recule beaucoup. Et puis il y a la pudeur de s'exposer, de mettre l'autre dans une position d'avoir un avis, de devoir aimer ou pas, de pouvoir s'exprimer librement… Il y a quelques années, un ami scénariste avait émis le souhait de lire un de mes scenarii non produit pour se faire une idée de mon travail, avant de se raviser en me disant "je ne veux pas avoir un avis sur ton travail, je ne veux pas risquer d'être en position d'avoir à choisir si j'aime ou je n'aime pas" et j'ai trouvé ça assez juste comme formulation.

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© 2020 by Carole Llewellyn

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